« J’avais trente-huit ans, un parcours exemplaire, Henry IV, ESSEC, une belle situation …Qui perd tout sens lorsqu’il s’avère que mon goût de l’engagement et du travail bien fait devient … un handicap !

J’en étais à ce constat désabusé lorsque ma mère me fit remarquer qu’il serait peut-être temps que j’apprenne à faire moi-même ces plats que mes enfants aiment tant et que je dévore malgré mon manque d’appétit du moment !

Le vieux livre écorné qu’elle me déniche est celui, reçu à son mariage à Alger il y a quarante ans, emporté dans sa valise pour la France où mes parents venaient avec comme premier souci de s’intégrer au mieux. Ce qu’au prix d’efforts et de sacrifices ils réussirent parfaitement en amenant leur cinq enfants au terme d’études supérieures.

En feuilletant ce livre j’ai pris conscience de ce qu’il signifiait. Au détour des recettes et des tours de main, charnellement, au-delà des mots, il me reliait à la culture d’origine de mes parents. Il était une part de notre histoire.

J’ai découvert une gastronomie authentique et méconnue. Celle d’un pays grand comme un continent, relié à l’Europe par la méditerranée et par son immense Sahara à l’Afrique. Riche de la variété des influences culturelles qui ont marqué son histoire qu’elles soient Berbères, Ottomanes, juives et bien sûr Françaises.

De là est né et s’est construit avec l’aide de la formidable équipe de l’école Ferrandi le projet de faire vivre et connaître cette cuisine en la respectant par la qualité, la simplicité et l’authenticité des produits tout en la faisant chanter par la richesse des saveurs et la tonalité des épices.

Cette aventure, je l’offre d’abord à ma mère pour m’avoir permis de me souvenir d’où venait ce que j’étais, à mon père sans qui je n’aurais pu être ce que je suis, à mes enfants et à leur breton de père dont c’est aussi l’histoire ; à mon beau-frère et à mon frère toute ma gratitude pour m’avoir accordé leur confiance en s’investissant à mes côtés pour mener à bien ce projet.

Et puis aussi à toutes celles et ceux qui me liront et auront peut-être envie, par curiosité, gourmandise ou nostalgie de passer la porte de mon restaurant. »